Questionnaire 

Noah Teichner



Quels sont les films qui ont marqué...
    1. Votre enfance ?

Le Magicien d'Oz (Victor Fleming, 1939), un des seuls « vieux » films que j'ai vu enfant, la première trilogie Star Wars, les émissions de la chaîne Nickelodeon des années 90 et du début des années 2000.

2. Votre adolescence

Les nombreux double features vus en 35 mm dans les salles de répertoire et les cinémathèques de Los Angeles, au moment de ma découverte de l'histoire du cinéma. Les films classiques hollywoodiens programmés sur la chaîne TCM. Les séances de cinéma expérimental de Los Angeles Filmforum.


3. Votre vie d’adulte

La liste est trop longue. Je me contente donc de citer quelques-uns des plus beaux films vus ces 2-3 dernières années : Simone Barbès ou la vertu (Marie-Claude Treilhou, 1980), Désordres (Cyril Schäublin, 2022), The Disintegrated Convict (Vitagraph, 1907), First Cow (Kelly Reichardt, 2019), Forensickness (Chloé Galibert-Laîné, 2020), Soft Fiction (Chick Strand, 1979), les courts métrages Biograph de 1897-1902 au format 68 mm réunis dans The Brillant Biograph (2020).


Racontez-nous un souvenir de cinéma.

Un road trip d’un week-end à San Francisco – je devais avoir 18 ans – pour voir un double programme du Journal d’un voleur de Shinjuku (Nagisa Oshima, 1968) et de La Pendaison (Oshima, 1968), rarissimes à l’époque aux États-Unis. Les copies de réduction en 16 mm étaient de qualité moyenne. Je me souviens d’avoir été très étonné de revoir Le Journal d’un voleur de Shinjuku quelques années plus tard et de découvrir qu’il y avait des séquences en couleurs !

Citez un film que vous associez… 

À une musique : 

Le “Cuckoo Theme” des films de Laurel & Hardy.

À un visage :

Les grimaces de Florence Turner dans Daisy Doodad’s Dial (Florence Turner, 1914). 

À un son :

Ernie Stanton faisant le ventriloque d’une guimbarde dans le court métrage Vitaphone Cut Yourself a Piece of Cake (1928).


À un lieu :

Le Grand Nord factice de The Fatal Glass of Beer (Clyde Bruckman, 1933) avec W.C. Fields.

À un vêtement :

Les costumes et chapeaux melons identiques du duo comique Shaw & Lee dans The Beau Brummels (Vitaphone, 1928).

Au silence :

Une projection sans accompagnement à la Cinémathèque française d’une copie 35 mm magnifique de Three’s a Crowd (Papa d’un jour, 1927) avec et de Harry Langdon.

Au désordre :

Les comédies de Jean Durand.

Qu’est-ce qui vous impressionne au cinéma ?

Assister à une séance dans une très grande salle comble.


Qu’est-ce qui vous amuse au cinéma ?

Les gags visuels et/ou verbaux, les numéros des comédies musicales.

Devant un film vous avez tendance à : contempler, rêver, analyser, vous laisser porter…?

Tous les quatre, en fonction du film et ce qu'il cherche à (me faire) faire.

Quels sont les films dans lesquels vous aimez vous perdre ?

Les films burlesques dans lesquels la vraisemblance et les lois de la gravité n’ont plus cours. 

Ce serait quoi pour vous « la magie du cinéma » ou la magie AU cinéma ?

Les « films à trucs » du cinéma des premiers temps.

La question du numérique et de la pellicule, à vos yeux c’est une simple histoire de surface ou un véritable questionnement sur la matière du cinéma ?

C'est une question de matière, mais aussi de machines, de gestes, de savoir-faire, de transmission, de réinvention...

Qu’est ce qui est cinégénique à vos yeux ?

Les intertitres des films muets.

Avec quelles autres pratiques artistiques votre cinéma dialogue-t-il le plus ?

L'écriture, l'art sonore, l'installation, la performance.

Est-ce que faire du cinéma vous aide à mieux comprendre le monde, à mieux l'observer ?

À mieux comprendre le monde, je ne sais pas ; à mieux regarder, écouter et réfléchir sur le monde, je l'espère.

Est-ce que vos films/livres/installations vous ressemblent ?

Je suppose que oui. Une personne qui a suivi la fabrication de Navigators a décrit sa forme comme une sorte d'autoportrait, tout en précisant qu’il fallait me connaître pour percevoir cet aspect du film.



 Noah Teichner est un cinéaste, artiste et chercheur né en 1987 aux États-Unis qui vit et travaille à Paris. Partant souvent de matériaux préexistants, ses films, installations et performances s’intéressent à la rencontre entre historiographie et humour. Diplômé de l’École nationale supérieure d’arts de Paris-Cergy et titulaire d’un doctorat en Études cinématographiques de l’Université Paris 8, il enseigne au département cinéma de Paris 8 et au master recherche-création d’ArTeC. Ses travaux de recherche portent sur l’histoire du cinéma comique, l’archéologie des médias et les sound studies. Il est membre du laboratoire cinématographique partagé L’Abominable – Navire Argo, où il a réalisé Navigators (2022), son premier long-métrage.

︎︎︎ noahteichner.com